Leitz Summitar 5 cm 1:2
Sommaire
- Présentation
- Pare-soleil, viseur, filtres
- Rendement optique et esthétique
- Exemples
- Naissance et évolution du Summitar
Présentation
Produit de 1939 à 1953. Monture vissante Leica M39. Objectif télescopique (collapsible) ; manipulations similaires à l’Elmar présenté par ailleurs. Version utilisée par votre serviteur : 1948. Superbe objet qui, malgré un gabarit modéré, fait sentir son poids de laiton chromé dans le creux de la main : pas de doute, c’est du matériel Ernst Leitz Wetzlar !
Grâce à l’ouverture maximale de f/2, on se découvre plus libre d’opérer qu’avec l’Elmar, bon petit objectif mais ouvrant seulement à f/3,5, soit quasiment quatre fois moins lumineux. A f/2 et une sensibilité de 400 ISO, on peut photographier sans flash dans un intérieur bien éclairé.
Caractéristiques principales :
- Monture vissante M39, donc utilisable sur les plus récents appareils à baïonnette M grâce à une simple bague d’adaptation.
- Formule optique : 7 éléments en 4 groupes.
- M.a.p. mini : 1 m.
- Diaphragme :
- Ouverture : maximum f/2.0. Minimum : f/12.5, puis f/16 (1946).
- 10 lames (jusqu’à 1949) ou 6 (1950 et ensuite).
- Bague non crantée, comme tous les objectifs de cette époque.
- Dimensions déployé : 42,7 mm (long.), 47,8 (diam.).
- Poids : env. 240 g.
- Filtres : spéciaux (type L).
Pare-soleil, viseur, filtres
Sans pare-soleil, le Summitar empiète peu dans la visée d’un Leica vissant (à plus forte raison avec un M). Mais la sagesse veut qu’on protège de la lumière oblique et des chocs sa large lentille frontale, plus sensible à la première et plus vulnérable aux seconds que celle d’un Elmar.
La monture avant du Summitar étant spécifique, le choix du pare-soleil va nous faire entrer dans le doute et les controverses par lesquels passent, chacun son tour, les utilisateurs de Summitar.
Il existe des pare-soleil spécial-Summitar (SOOPD et SOOFM), constitués de panneaux pliants ; réellement efficace, il sont conçu de manière à dispenser d’utiliser un viseur annexe ; ils se replient sur l’objectif, ce qui remplace efficacement le bouchon. Mais leur énormité et leur laideur ont de quoi faire hésiter : à quoi bon utiliser un joli appareil des années 40 voire avant, si c’est pour en faire un engin encombrant et être immédiatement repéré au milieu de la foule, pris pour un utilisateur de camera video spéciale ? D’un autre côté, les SOOPD/SOOFM remplissent parfaitement leur office, sont faciles à trouver (parfois à très bas prix) ; et, dans les lieux publics, petit succès garanti…
Noter qu’il y a eu deux versions de SOOPD : la première destinée aux Summitar originels, à bague de serrage. Le second type s’enclipse sur la rainure avant des modèles plus récents. Le SOOFM, destiné aux Summicron et Summitar récents, est rigoureusement semblable à cette dernière.
Voir aussi la pages sur les accessoires [http://www.dg77.net/photo/leicaM39/accessoi.htm#soopdfm].
Pour étendre les possibilités, on se munira de l’adaptateur SNHOO / 13078, qui permet d’installer les filtres E39 à la place des filtres spécifiques au Summitar, et par suite tout pare-soleil « générique » au même standard.
Un pare-soleil ajouré présente en théorie l’avantage de dispenser de viseur externe (faute de quoi ce n’est pas la peine). Le 12585, par exemple, pourra être utilisé (s’attendre à un peu de jeu car le diamètre sur le Summitar est inférieur d’un demi-millimètre par rapport à la norme E39).
Mon Summitar 1948, avec sa rainure à 4 mm en retrait de l’avant, permet d’y accrocher certains pare-soleil Leitz, mais pas toujours solidement :
- ITOOY pour Elmar 5 cm. Le cylindre se visse sur la bague enclipsable, ce qui permet, en le dévissant suffisamment pour commencer, d’assujettir l’ITOOY. Ce pare-soleil offre une excellente protection, mais le vignettage est garanti.
- IROOA pour objectif 3,5 cm. Aucun risque de vignettage c’est sûr. Mais l’accrochage est très imparfait sur l’objectif que je possède.
Si on ne peut se passer de viseur externe, on pourra choisir entre le SBOOI et le VIOOH si on se limite aux principaux modèles Leitz/Leica. Mais il y a aussi les équivalents Soviétiques, Japonais et autres ; le choix est vaste.
Rendement optique et esthétique
Piqué
Les images fournies par cet objectif sont nettes au centre dès la pleine ouverture. A f/4 la plus grand partie du champ est très bonne, avec une réserve : dans les contre-jours, le contraste global peut faiblir ou un « point chaud » risque de sévir sur une portion de l’image. Mais à part cette éventualité un Summitar donnera des images aussi bonnes qu’un Elmar à ouverture égale.
Le rendu du Summitar le rend particulièrement recommandable pour les portraits et la photo en noir-et-blanc en général.
Couleurs
Le rendu des couleurs est un des atouts du Summitar. Il donne des couleurs naturelles mais avec des nuances pastel qui rendront aisément identifiables vos photos faites avec cet objectif ; c’est une raison supplémentaire pour le recommander en portrait. Sous certains éclairages les couleurs pourront prendre un aspect aquarellé.
Bokeh
Sur certains sujets, le diaphragme hexagonal des versions les plus récentes peut donner des résultats différents de celui à 10 pales : sur des photos que j’ai pu voir, les points lumineux sont transformés en figures étoilées pas très plaisantes à mon avis.
En tout état de cause, les taches de flou sont bien circulaires et agréables au centre ; mais ailleurs elles prennent une forme lenticulaire de plus en plus aplatie au fur et à mesure qu’on approche des bords. D’où un aspect « tournoyant » qui peut surprendre, voire déplaire.
Divers
Bonnes nouvelles : le Summitar vignette peu, sa distorsion est négligeable.
Le Summitar est affecté d’un léger focus shift (déplacement du centre optique en fonction de l’ouverture du diaphragme). Il est souvent écrit que le passage en 1950 au complexe diaphragme à 6 doubles-lames (au profil en calotte de sphère) avait pour but de lutter contre ce défaut. Il semble que le problème n’atteint pas le degré connu avec un Noctilux ou un Sonnar.
Exemples
Intérieur, diaphragme fermé
Intérieur, pleine ouverture — sans pare-soleil
Extérieur, pleine ouverture
Images sans renforcement ni correction colorimétrique.
Extérieur, diaphragme fermé
Images sans renforcement ni correction colorimétrique.
Naissance et évolution du Summitar
Quelques repères indispensables au photographe et au collectionneur qui se trouvent en présence de ce type de matériel.
Mise en perspective
Pour équiper les Leica, Leitz développa une gamme d’objectifs, notamment dans la focale de base de 50 mm :
- Elmar (1925) : quatre lentilles, compact et économique, images bien contrastées ; mais peu lumineux (f/3,5 — ouverture portée à f/2,8 en 1956).
- Hektor f/2,5 (1931-1948), 6 lentilles. Mieux corrigé pour la couleur (par rapport aux Elmar d’avant 1946). Objectif très lumineux pour l’époque (mais assez faible, surtout à grande ouverture).
- A f/2,0 :
- Summar, 1933-1940, 6 lentilles (type Biotar). Objectif étonnament bon au centre, mais peu homogène, vignettant fort et au contraste peu élevé. Noter encore la lentille frontale en verre très tendre.
- Summitar, 1939-1953, 7 lentilles, commenté ici. Globalement en progrès sur le Summar.
- Summicron, 7 lentilles (1953-1968), puis 6. Bénéficia de l’apparition de nouveaux verres et des progrès des traîtements (on passe de 6 à 10 surfaces air-verre interne sans que le contraste en souffre).
- Objectifs très lumineux (tous 7 lentilles) :
- Xenon (1936-1948) et Summarit (1949-1960) f/1,5. Le second diffère du premier uniquement par l’ajout d’un traîtement anti-reflets. Il est juste de rappeler que le Xenon était produit sous licence Schneider.
- Summilux f/1,4. Apparu en 1959, il ne concernait plus les « vissants » mais rappelé quand-même ici car Leitz produisit en 1999 une édition spéciale Japan en monture LTM.
L’Elmar est un proche cousin du Tessar ; les Hektor, quant à eux, sont apparentés aux Heliar. Les deux appartiennent à la dynastie des triplets. Vous saurez tout sur cette catégorie en consultant notre page Le triplet et sa famille [http://www.dg77.net/photo/tech/fasttrip.htm].
Les objectifs plus lumineux (Summar et la suite) furent conçus à partir du Planar, le fameux double-Gauss amélioré, calculé par Rudolph en 1896. En ce domaine, on trouvera tous les éclaircissements utiles dans notre page introductive Gauss et sa postérité [http://www.dg77.net/photo/tech/fastgaus.htm#summar], prolongée par : Variantes ultra-lumineuses du type Gauss [http://www.dg77.net/photo/tech/fastvarg.htm#xenon]
Conception optique
Le Summitar est un type particulier de Planar, caractérisé par un large doublet avant. Sur le sujet en général, la lecture des pages indiquées précédemment nous dispense d’ajouter quoi que ce soit.
Plus particulièrement, c’est le choix d’une large lentille frontale, pour réduire le vignettage, qui amena à la dédoubler pour obtenir une correction suffisante à la périphérie. Le champ est légèrement courbe mais, comme le sait certainement le lecteur, cela rend plus facile au calculateur la lutte contre l’astigmatisme (en même temps l’aberration sphérique est plutôt bien maîtrisée)… Si l’image est moins brillante au centre par rapport au Summar précédent, la qualité générale est incontestablement en hausse.
Bon à savoir : le Summitar a une lentille frontale en verre d’un type moins fragile que le Summar (et même que les Summicron ultérieurs).
Evolution
- 1939 :
- Verres non traîtés.
- Diaphragme à 10 pales.
- Ouvertures graduées à l’ancienne (2 / 2.2 / 3.2 / 4.5 / 6.3 / 9 / 12.5).
- 1946 :
- Traîtement anti-reflets2.
- Ouvertures : 2 / 2.8 / 4 / 5.6 etc.
- 1950 : diaphragme 6 pales3.
Notes
- 1. Autre utilisation du Summitar sur appareil moderne : converti en équivalent 100mm
- 2. Les premiers traîtements datent de 1942, mais ils furent peu appliqués, et la plupart, estampillés Luftwaffe Eigentum, ne subsistent plus en très grand nombre !
- 3. Sur le diaphragme deuxième version, on s’accorde à dire qu’il ne faut surtout pas le démonter : cauchemard d’horloger, semble-t-il (12 pales en deux couches reliées par un mécanisme complexe).