L’ancêtre Petzval
En 1840, le mathématicien Hongrois Józeph Petzval (6/1/1807-17/9/1891) calcula une formule optique – dont la réalisation fut confiée à une certaine maison Voigtländer, à Vienne. L’objectif de Petzval consiste en deux doublets (achromatique pour le groupe avant, mais pas pour le postérieur). Cet objectif avait une ouverture de 1:3.4, étonnante à côté des 1:16 qui était le mieux que la technique pouvait offrir alors avec une couverture correcte de l’image. Les 4 diaphragmes gagnés représentant 16 fois plus de lumière, le supplice des séances de portrait se trouva grandement adouci : la pose passait de 10mn à 30s environ !1
Les potentialités du Petzval en matière d’amélioration de l’ouverture sont certaines. Mais, affecté d’astigmatisme [*], de courbure de champ [*], de chromatisme [*] et d’un champ réduit de 15°, il est peu utilisable en dehors de la projection ou du portrait (il souffre aussi d’aberration sphérique [*] qui crée à courte distance une « enveloppe » appréciée des dames d’age mûr).
A la même époque, Petzval étudia rigoureusement l’astigmatisme [*] et montra (1843) que sa correction exigeait des verres inexistants alors. Produit de ces calculs, le terme somme de Petzval [*] est toujours utilisé. Les « verres nouveaux » à indice de réfraction élevé virent le jour en 1886, chez Schott, maison fondée en 1879 à Jena, (le fief de Carl Zeiss depuis 1846…)
On améliora ensuite le type Petzval par un cinquième élément à l’arrière, destiné à réduire la forte courbure de champ [*]. Cette trouvaille de l’élément arrière est attribuée à Charles Piazzi-Smyth (1819-1900), anglais de la catégorie original, surtout connu comme égyptologue2 et astronome.
Avec 4 éléments ou davantage, les obectifs Petzval devinrent très répandus jusque dans les années 1920. La formule contribua, comme souvent, à la fortune de l’industriel Voigtländer, et pas du tout à celle de l’inventeur Józeph Petzval.
En 1929 le Dallmeyer 25mm 0.99 (qui figure dans les exemples donnés au début [http://www.dg77.net/photo/tech/fastex.htm#dall]) offrit, avec seulement quatre lentilles, une ouverture supérieure à f/1,0. Destinée au reportage cinématographique en format 16 mm, cette optique était loin d’offrir une définition satisfaisante pour les photographes sur la plus grande partie du champ.
Des améliorations (verres modernes, courbure des lentilles modifiée, collage d’éléments supplémentaires) ont donné des dérivés du Petzval très lumineux et efficaces mais spécialisés : ce sont principalement des objectifs destinés à la photographie d’écrans radioscopiques. Les conditions fixes de prise de vue, de moindres exigences par rapport à la prise-de-vue générale, ainsi que le rayonnement uniforme (qui réduit les complications de la correction du chromatisme) sont de nature à simplifier le calcul et rendent plus faciles de pareilles performances.
Comme exemples on citera les R-Biotar f/0,85 de Merté (1927 – ne pas confondre avec le Biotar tout court), l’objectif f/0,9 par Warmisham, et le f/0,6 de Kaprelian. Les schémas qui suivent sont tirés de l’article d’Ed. Kaprelian, dans le Journal of Motion Picture Engineers de juillet 1949.
Le R-Biotar de Willy Merte était un 45 mm couvrant le format 16 mm. Il comporte un espace entre les deux premiers éléments suivis par une lentille supplémentaire. Warmisham, quant à lui, avait ajouté un ménisque immédiatement après le premier groupe, aidant à atteindre la haute luminosité tout en réduisant l’aberration sphérique.
L’objectif f/0,6 de Kaprelian (US Pat. 2,424,827/1947, B.J.A. 1949, p.171) était un dérivé du R-Biotar, amélioré par un élément supplémentaire pour mieux contrôler les aberrations chromatiques et sphériques. Il fut développé au sein d’US Army Signals Corps sous la forme d’un 54 et d’un 33 mm (le second pour ciné 16 mm).
Notes
- 1. Ces chiffres d’ouvertures faibles et de très longs temps de poses sont souvent répétés. Néamoins, dès le daguerréotype (donc avant 1840) des expositions sensiblement plus brèves étaient possibles. Cf supra premières optiques [http://www.dg77.net/photo/tech/fastold.htm#prem].
- 2. Piazzi Smith égyptologue, cf Umberto Eco, Il pendolo di Foucault, Bompiani – Milan 1988, chap. 47 fine.