Umberto Eco, A reculons, comme une écrevisse
Ed. Grasset, trad. Pierre Laroche
I – De la guerre, de la paix et d’autres sujets
Quelques réflexions sur la guerre et la paix
La néoguerre du Golfe
[…] Décider que les guerres classiques ont produit des résultats raisonnables, un équilibre final, relève d’un préjugé hégélien selon lequel l’Histoire a une direction. Il n’y a aucune preuve scientifique, ni logique, que l’organisation de la Méditerranée après les guerres puniques ou celles de l’Europe après les guerres napoléoniennes doive être tenue pour un équilibre. Elle pourrait être considérée comme un état de déséquilibre qui ne se serait pas produit s’il n’y avait pas eu la guerre. Le fait que l’humanité ait, pendant des dizaines de milliers d’années, pratiqué la guerre comme solution des états de déséquilibre n’est pas plus probant que le fait que, pendant la même période, elle ait décidé de résoudre des déséquilibres psychologiques en recourant à l’alcool ou à d’autres drogues.