Le web de Dominique Guebey – Les belles lettres

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   D o m i n i q u e   G u e b e y    J u n g l e      Les belles lettres

D.A.F. de Sade (1740-1814) La Philosophie dans le Boudoir (suite - Cinquieme dialogue)

S-A : Ah ! Foutons ! Foutons !… Je ne puis plus tenir à ces propos ; nous y reviendrons, Dolmancé ; mais, pour ajouter plus de foi à vos aveux, je ne veux les entendre qu’à tête fraîche. Quand vous bandez, vous aimez à dire des horreurs, et peut-être nous donneriez-vous ici pour des vérités les libertins prestiges de votre imagination enflammée. (On s’arrange.)

D : Attends, chevalier, attends : c’est moi-même qui vais l’introduire ; mais il faut préalablement, j’en demande pardon à la belle Eugénie, il faut qu’elle me permette de la fouetter pour la mettre en train. (Il la fouette.)

Eu : Je vous réponds que cette cérémonie était inutile… Dites, Dolmancé, qu’elle satisfait votre luxure ; mais, en y procédant, n’ayez pas l’air, je vous prie, de rien faire pour moi.

D, toujours fouettant : Ah ! Tout à l’heure, vous m’en direz des nouvelles !… Vous ne connaissez pas l’empire de ce préliminaire… Allons, allons, petite coquine, vous serez fustigée !

Eu : Oh ! Ciel ! Comme il y va !… Mes fesses sont en feu !… Mais vous me faites mal, en vérité !…

S-A : Je vais te venger, ma mie ; je vais le lui rendre. (Elle fouette Dolmancé.)

D : Oh ! De tout mon cœur ; je ne demande qu’une grâce à Eugénie, c’est de trouver bon que je la fouette aussi fort que je désire l’être moi-même ; vous voyez comme me voilà dans la loi de la nature ; mais, attendez, arrangeons cela : qu’Eugénie monte sur vos reins, madame ; elle s’accrochera à votre col, comme ces mères qui portent leurs enfants sur leur dos ; là, j’aurai deux culs sous ma main ; je les étrillerai ensemble ; le chevalier et Augustin me le rendront en frappant à la fois tous deux sur mes fesses… Oui, c’est ainsi… Ah ! Nous y voilà !… Quelles délices !

S-A : N’épargnez pas cette petite coquine, je vous en conjure, et comme je ne vous demande point de grâce, je ne veux pas que vous lui en fassiez aucune.

Eu : Ahe ! Ahe ! Ahe ! En vérité, je crois que mon sang coule.

S-A : Il embellira tes fesses en les colorant… Courage, mon ange, courage ; souviens-toi que c’est par les peines qu’on arrive toujours aux plaisirs.

Eu : En vérité, je n’en puis plus.

D suspend une minute pour contempler son ouvrage ; puis, reprenant : Encore une soixantaine, Eugénie ; oui, oui, soixante encore sur chaque cul !… Oh ! Coquines ! Comme vous allez avoir du plaisir à foutre maintenant ! (La posture se défait.)

S-A, examinant les fesses d’Eugénie : Ah ! La pauvre petite, son derrière est en sang !… Scélérat, comme tu as du plaisir à baiser ainsi les vestiges de ta cruauté !

D, se polluant : Oui, je ne le cache pas, et mes baisers seraient plus ardents si les vestiges étaient plus cruels.