Le web de Dominique Guebey – Les belles lettres

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   D o m i n i q u e   G u e b e y    J u n g l e      Les belles lettres

Angelo Rinaldi, Les Roses de Pline

Ed. Gallimard

(p. 110/338)

… Par l’intermédiaire de ma cousine qui opposait le même refus à la même invitation, je lui servais une petite pension, afin qu’il continue de s’occuper des rosiers de la Villa — ma mère les avait plantés. Ceux de l’espèce décrite par Pline couraient le long de la partie droite du rez-de-chaussée ; les autres formaient les deux buissons qui inclinaient même à l’automne, sur les marches du perron, leurs fleurs rouges qui résistaient en général jusqu’à la visite de la Princesse, à moins que ne se produise l’orage que les paysans espéraient pour la Toussaint. Le mot « corymbe » leur était associé dans ma mémoire, tiré sans doute des commentaires de M. Tiberi, toujours précis dans l’emploi du langage et qui saisissait chaque sphère éclatante comme on repousse un sein de femme vers le haut de la poitrine par une carresse en dessous. J’en avais oublié le sens depuis des années, si je l’avais jamais connu avec exactitude ; je me garderais de le rechercher aujourd’hui dans le dictionnaire pour ne pas détruire tout ce que j’y plaçais d’enchanteur et l’illusion que ce mot était ma propriété exclusive. Il était facile de vider une maison de ses meubles, objets, tableaux, livres, mais arracher les rosiers ?

(p. 172)

… passé vingt ans, pour un homme, il n’y a plus d’âge, rien que des infirmités …


Ramón Gómez de la Serna, Polycéphale et Madame

Ed. André Dimanche, traduction Carmen Abreu

Chapitre XXV, HGDTENBCV MXGDF ?

[…]

Sans retard, deux grands verres ballons vinrent encadrer la bouteille sortie de son excavation, et comme toujours, Perfecto se mit à pontifier sur le cognac

— Les grands récipients transparents ont un secret ; non pas celui de l’abondance, mais de l’arôme… Ils permettent au filet de cognac de se répandre dans l’ampleur du cristal, et de nous rendre le parfum de ces émanations d’un santal désormais introuvable, qui ont imprégné les premières barriques et lui ont donné son goût.

— J’ai entendu dire que les verres ballons ont ces rondeurs pour qu’on puisse les réchauffer comme on étreint un corps dans un bal populaire.

— J’ai du mal à le croire. Ces verres n’ont-ils pas une taille tellement fine qu’on peut à peine les prendre comme on prend une fleur ?