Le web de Dominique Guebey – Les belles lettres

Page : http://www.dg77.net/pages/sade/ph303.htm


   D o m i n i q u e   G u e b e y    J u n g l e      Les belles lettres

D.A.F. de Sade (1740-1814) La Philosophie dans le Boudoir (suite - Troisieme dialogue)

S-A : Soit que cette introduction se fasse par-devant, soit qu’elle se fasse par derrière, lorsqu’une femme n’y est pas encore accoutumée, elle y éprouve toujours de la douleur. Il a plu à la nature de ne nous faire arriver au bonheur que par des peines ; mais, une fois vaincue, rien ne peut plus rendre les plaisirs que l’on goûte, et celui qu’on éprouve à l’introduction de ce membre dans nos culs est incontestablement préférable à tous ceux que peut procurer cette même introduction par-devant. Que de dangers, d’ailleurs, n’évite pas une femme alors ! Moins de risque pour sa santé, et plus aucun pour la grossesse. Je ne m’étends pas davantage à présent sur cette volupté ; notre maître à toutes deux, Eugénie, l’analysera bientôt amplement, et, joignant la pratique à la théorie, te convaincra, j’espère, ma toute bonne, que, de tous les plaisirs de la jouissance, c’est le seul que tu doives préférer.

D : Dépêchez vos démonstrations, madame, je vous en conjure, je n’y puis plus tenir ; je déchargerai malgré moi, et ce redoutable membre, réduit à rien, ne pourrait plus servir à vos leçons.

Eu : Comment ! Il s’anéantirait, ma bonne, s’il perdait cette semence dont tu parles !… Oh ! Laisse-moi la lui faire perdre, pour que je voie comme il deviendra… Et puis j’aurais tant de plaisir à voir couler cela!

S-A : Non, non, Dolmancé, levez-vous ; songez que c’est le prix de vos travaux, et que je ne puis vous le livrer qu’après que vous l’aurez mérité.

D : Soit, mais pour mieux convaincre Eugénie de tout ce que nous allons lui débiter sur le plaisir, quel inconvénient y aurait-il que vous la branliez devant moi, par exemple ?

S-A : Aucun, sans doute, et j’y vais procéder avec d’autant plus de joie que cet épisode lubrique ne pourra qu’aider nos leçons. Place-toi sur ce canapé, ma toute bonne.

Eu : O Dieu ! La délicieuse niche ! Mais pourquoi toutes ces glaces ?

S-A : C’est pour que, répétant les attitudes en mille sens divers, elles multiplient à l’infini les mêmes jouissances aux yeux de ceux qui les goûtent sur cette ottomane. Aucune des parties de l’un ou l’autre corps ne peut être cachée par ce moyen : il faut que tout soit en vue ; ce sont autant de groupes rassemblés autour de ceux que l’amour enchaîne, autant d’imitateurs de leurs plaisirs, autant de tableaux délicieux, dont leur lubricité s’enivre et qui servent bientôt à la compléter elle-même.

Eu : Que cette invention est délicieuse !

S-A : Dolmancé, déshabillez vous-même la victime.